"Il est de la plus haute importance que l'âme s'exerce beaucoup à l'AMOUR, afin que, se consommant rapidement, elle ne s'arrête guère ici-bas, mais arrive promptement à voir son Dieu face à face." (S. Jean de la Croix)

MES RETRAITES

Avis aux lecteurs...

Première Série des Retraites

du Père Onésime LACOUTURE, s.j.

Doctrine surnaturelle

pour se défaire de toute mentalité païenne.


Onzième Instruction

La Folie de la Croix :

Première Partie



" Si quelqu’un veut être mon disciple, qu’il se renonce lui-même, qu’il porte sa croix chaque jour et qu’il me suive."
Luc 9-23.

Plan

Remarque: son importance

Sa nécessité vient…

Dieu l’exige de…

Deuxième Partie : Doctrine de St Paul

Troisième Partie : Exemples. ( Douzième Instruction)

Remarque.

Nous avons vu que la gloire de Dieu exige que nous voyions les perfections divines à travers les créatures et son activité divine dans tous ses échantillons qui agissent d’une manière ou d’une autre, excepté dans le péché. Puisque Dieu est tout à fait tout dans ce monde, la conséquence est que nous devons nous effacer devant tout ce divin, qui doit supplanter l’humain en nous et détrôner notre personnalité morale pour établir Dieu en souverain Maître sur toute l’activité du chrétien.

Cesser d’agir en homme pour n’agir qu’en enfant de Dieu est la mort du "païen" en nous. Ce renoncement à tout son être répugne à tout être raisonnable; c’est une folie pour lui au point de vue naturel, et comme les hommes en général jugent ordinairement selon ce point de vue, on peut dire qu’une chose est folle quand les hommes la trouvent folle à leur point de vue. Ainsi St Paul quand il dit que Dieu a choisi ce qui est fou aux yeux des hommes, condescend à parler comme eux, quoique plus loin il dit que cette folie est la sagesse de Dieu vue au point de vue surnaturel. Nous avons donc le droit d’appeler ce renoncement une folie et comme Jésus, après l’avoir demandé, dit qu’il faut porter sa croix, on peut dire que là est la folie de la croix.

C’est cette folie que St Paul appelle sagesse de Dieu et force de Dieu. Cette doctrine est la plus merveilleuse au monde et la clef pour comprendre les incompréhensibles voies de Dieu dans sa providence. Elle transforme les jugements des hommes et leurs appréciations des choses et des personnes. Tout est renversé par cette folie de la croix; les hommes aiment ce qu’ils méprisaient et méprisent ce qu’ils aimaient. Les causes d’énervement et d’impatience deviennent des causes de joie et de paix. Par elle se vérifie cette parole de l’Évangile: "Envoyez votre Esprit Saint et ils seront créés et vous renouvellerez la face de la terre." C’est donc tout un monde nouveau!

La doctrine de la folie de la croix vérifie une partie de cette parole d’Isaïe, 55-8, que les pensées de Dieu et les voies de Dieu sont aussi élevées au-dessus de celles des hommes que le ciel est élevé au-dessus de la terre. Elles dépassent complètement les façons de penser et de faire des hommes.

Voici un exemple du renoncement que cette folie de la croix demande aux chrétiens. Dans une hostie consacrée on voit du pain, on le touche, on le goûte, la raison dit donc que c’est du pain. Cependant, la foi nous enseigne qu’il n’y a plus de pain là, ce ne sont que les apparences du pain. Il faut donc qu’un chrétien renonce à toute son activité humaine pour agir comme s’il était déjà dans le ciel; il cesse d’agir comme un homme pour agir comme un enfant de Dieu.

Ce que les chrétiens font au sujet de l’hostie consacrée, ils doivent le faire par rapport à toutes les créatures de Dieu: ne pas s’arrêter au sensible pour ne considérer que le divin sous les voiles du sensible. Au sujet de l’hostie on peut croire trop facilement qu’on a la foi, parce que l’hostie nous laisse bien tranquilles. Or la même foi veut que nous voyions Dieu dans toutes les personnes et que nous les traitions comme Dieu lui-même. Comme cela est rare! Car les personnes réagissent, peuvent nous contrarier de toutes sortes de façons. Il faudrait les traiter toutes comme des hosties consacrées quoique la présence divine ne soit pas de même sorte dans les deux cas.

Le peu de foi dans nos relations avec le prochain indique une grande ignorance de la nécessité de pratiquer cette folie de la croix; elle nous fera respecter toute personne quelque désagréable qu’elle puisse être… parce qu’elle est désagréable! Cette sagesse divine est tellement contraire à la sagesse humaine et les démons font tant d’efforts pour empêcher les prêtres de l’expliquer au peuple qu’il nous faut l’étudier pour l’approfondir le mieux possible afin de la faire entrer dans notre vie quotidienne.

Sa nécessité vient…

De notre destinée surnaturelle qui est la vision béatifique ou la participation créée à l’activité intime des trois personnes divines par notre union avec J-C. dans la grâce. C’est dans notre fin dernière que nous devons aller chercher les moyens pour l’obtenir. Or Dieu nous a prédestinés antécédemment à tout péché; donc aussi il avait choisi les moyens pour que nous y arrivions antécédemment aussi à tout péché. Ce moyen est le renoncement à toute notre activité naturelle et libre pour prendre l’activité divine correspondante.

Le ciel n’est pas seulement un endroit où Dieu se montre; dans ce cas n’importe quel homme pourrait regarder Dieu. C’est beaucoup plus que cela; c’est une participation à la vie intime des trois divines Personnes. J-C. nous dit: "La vie éternelle est de vous connaître, vous le seul vrai Dieu et celui que vous avez envoyé J-C." Plus loin il dit: "Je me sanctifie moi-même pour eux afin qu’ils soient aussi sanctifiés dans la vérité. Je ne prie pas pour eux seulement, mais encore pour ceux qui doivent croire en moi par leur parole afin qu’ils soient tous une seule chose comme vous, mon père, vous êtes en moi et moi en vous, et qu’ils soient de même une seule chose en nous afin que le monde croie que vous m’avez envoyé. Et je leur donne la gloire que vous m’avez donnée afin qu’ils soient une seule chose, comme nous sommes une seule chose." J. 17. Nous sommes donc appelés à aller jouir de la vie intime de la Trinité comme l’humanité de Jésus elle-même. Là-haut nous agirons donc comme Dieu, en Dieu et par Dieu; dans sa vie intime avec sa sagesse divine et son amour divin. Quand on dit qu’on verra Dieu face à face, cela ne veut donc pas dire seulement le regarder, mais reproduire exactement son activité trinitaire sur le même plan que lui quoique d’une façon créée.

Or pour agir divinement il faut être divinisé non seulement dans sa substance par la grâce sanctifiante, mais aussi dans ses facultés spirituelles et dans leur orientation libre des intentions ou des motifs, donc totalement, ce qui exige un grand renoncement de soi-même et de tout son être moral.

Voici un exemple imparfait, mais suffisant pour donner une bonne idée du renoncement que notre destinée surnaturelle requiert de nous. Un homme peut-il prendre une de ses idées et me la mettre dans mon esprit comme il mettrait un bonbon dans ma main? Pour que je puisse recevoir son idée, il faut qu’elle cesse d’être la sienne et qu’elle meure en chemin pour qu’elle soit mon œuvre entière quand elle sera dans mon esprit.

Par exemple, il pense à Dieu et il veut me donner son idée. Il prononce le mot Dieu en ma présence. Ce n’est pas son idée qui m’arrive, mais seulement des vibrations de l’air qui frappent mon oreille et par un mécanisme merveilleux que Dieu a mis là, ces vibrations m’arrivent au cerveau matériel et là mon esprit se forme l’idée de Dieu. C’est donc mon propre esprit qui se forme cette idée de Dieu et la sienne est morte en chemin me laissant que des vibrations de l’air qui se répercutent au tympan et de là à mes oreilles cérébrales, à l’aide desquelles mon esprit reproduit l’idée de Dieu.

Eh bien! pour pénétrer dans l’esprit de Dieu ou dans l’essence divine, il faut que ce soit l'œuvre unique de Dieu; voilà pourquoi il faut que tout être meure en cours de route pour ainsi dire afin qu’il soit obligé d’attribuer à Dieu seul son existence dans l’essence divine. Dieu exige donc le renoncement libre à tout son être pour toute personne admise à la vision béatifique afin qu’elle soit obligée de dire: Dieu seul m’a mise ici!

La gloire de Dieu exige donc le renoncement pour tout être qui est destiné à une fin surnaturelle en Dieu. Voilà donc le renoncement absolument nécessaire antécédemment à tout péché. Qu’on cesse donc de prêcher le renoncement uniquement en fonction du péché ou de la passion de J-C. Le renoncement est exigé avant tout cela… par la seule destinée surnaturelle à la vision béatifique. Prêchons donc cette vérité aux fidèles; elle est autrement prenante que l’idée du péché ou même de l’imitation de la passion de J-C.

Naturellement, l’homme veut suivre ce qu’il est par nature et agir comme un homme, mais puisque par grâce, il est divinisé dans tout son être il doit agir divinement. Voilà le renoncement… Car toute cette grâce est absolument insensible à l’homme, il est donc porté à agir comme s’il ne l’avait pas et donc comme un païen. Il le fera donc s’il veut! Jésus l’insinue quand il dit: "si quelqu’un veut être mon disciple, qu’il se renonce lui-même, qu’il prenne sa croix tous les jours et qu’il me suive." C’est donc pénible pour un homme de cesser d’agir comme un homme pour agir comme un enfant de Dieu.

Qu’on remarque bien que le renoncement n’est pas dans le fait de recevoir la grâce sanctifiante, mais c’est d’agir selon ses exigences quand on l’a. C’est cette dernière partie qui nous donne notre mérite, la grâce sanctifiante n’est qu’une condition du mérite. C’est quand on agit librement avec ses facultés spirituelles qu’on a du mérite et qu’on donne à Dieu sa gloire et qu’on lui fait plaisir.

Ainsi l’enfant n’a aucun mérite devant ses parents pour qu’ils le mettent au monde; ils ne l’ont pas consulté pour cela. Mais c’est quand il agit en homme qu’il honore ses parents et leur fait plaisir. S’il n’a que leur nature et n’agit pas en homme dans ses facultés intellectuelles, c’est un homme, mais c’est aussi un idiot!…

Voilà ce que St Paul appelle mourir à soi pour ne plus vivre qu’en J-C. Cette idée revient constamment dans nos épîtres. C’est elle qui transformait les premiers chrétiens en véritables enfants de Dieu et qui leur donnait la force d’aller au martyre plutôt que de perdre la vision béatifique. Les Pères de l’Église comme les Apôtres reviennent souvent sur la nécessité pour nous d’agir comme Dieu puisque nous sommes ses enfants. Soyez saints comme Dieu est saint était le sujet le plus souvent donné aux premiers chrétiens et ils tranchaient absolument sur les païens de leur temps. Quel dommage que les prêtres ne tiennent pas cette idée plus souvent devant les yeux de nos chrétiens!

De nos jours les prédicateurs vont surtout chercher leurs arguments dans le péché et en enfer; c’est loin d’être aussi efficace que l’idée de la participation à la vie divine de la Trinité. Voici un exemple: Quand on part pour faire un voyage de plaisir, c’est de cette fin qu’on parle, que l’on veut et que l’on prépare. C’est à peine si on pense aux accidents possibles. Faisons donc de même pour notre grand voyage de plaisir en la Trinité. Fixons tellement notre esprit là que nous fassions tout en notre pouvoir pour y arriver, alors, les accidents possibles seront éliminés par cette ardeur à vouloir notre fin dernière en Dieu.

Plus nous nous convaincrons de notre nature divine quoique par participation et plus nous pourrons pratiquer des vertus qui dépassent notre nature. Par exemple, Baptiste me donne un coup de poing en pleine figure; si j’agis selon ma nature humaine, je vais me venger. Mais puisque je suis l’enfant de Dieu, je dois agir comme mon Père au ciel. Or est-ce que Dieu va punir Baptiste tout de suite? Non, il va lui donner ses trois repas comme avant, son soleil va se lever pour lui comme pour moi. Donc je dois refouler toutes mes humeurs et mes passions naturelles et faire du bien à Baptiste comme le bon Dieu continue de lui en faire. Que je l’invite à dîner? ou que je lui fasse quelque présent; Jésus veut que je l’aime et que je lui fasse du bien! Si je veux aller avec Jésus, je dois lui obéir et l’imiter en faisant du bien à mon ennemi au sens humain, mais à mon ami dans l’ordre surnaturel où je dois vivre!

Voilà donc le renoncement absolument nécessaire uniquement à cause de notre destinée surnaturelle au ciel. Puisque nous allons participer à l’activité trinitaire au ciel, nous devons commencer cette participation tout de suite et donc en rejetant notre propre activité païenne pour mettre à la place de l’activité divine avec la grâce de Dieu.

Du péché originel. Par ce péché le plan divin fut ruiné et le ciel fermé aux hommes. Comme conséquence, chacun ajouta ses propres péchés personnels et la concupiscence entraîne les hommes vers les plaisirs des sens même défendus, et ses facultés ont été affaiblies indirectement et obscurcies.

L’homme doit donc satisfaire la justice divine pour ses péchés et le péché originel dont nous sommes tous solidaires. De plus il doit constamment combattre ses mauvaises tendances de la concupiscence. Tout cela exige du renoncement déjà et beaucoup de renoncements! Donc l’obligation du renoncement déjà existante devient plus urgente à cause du péché. Le péché reste une cause partielle de sa nécessité. Si un boxeur veut lutter contre un adversaire, il doit s’entraîner longtemps. Mais s’il est malade il doit d’abord se guérir, refaire ses forces perdues, puis il lui reste après cela à s’entraîner quand même. C’est la même chose pour l’homme déchu; il doit d’abord refaire ses forces perdues par le péché, puis une fois parfaitement sain, il lui reste à se renoncer quand même pour agir en enfant de Dieu pour aller au ciel. Il ne suffit donc pas de ne plus agir en démon, ni d’agir comme un homme, il faut agir comme un Dieu! Soyez parfait comme votre Père céleste est parfait…

Qu’on cesse donc de toujours exiger le renoncement à cause du péché; c’est la moins importante, la moins efficace et la moins encourageante des raisons. Les serviteurs pour éviter le fouet ou pour ne pas mourir de faim agissent ainsi, mais les enfants travaillent pour plaire à leur père, pour lui ressembler et par amour pour lui, pour se rendre dignes de l’héritage. Allons donc chercher nos motifs de renoncement dans notre destinée surnaturelle au ciel, tout en nous servant des autres aussi.

Une triste conséquence de cette cause partielle toujours donnée comme la seule cause du renoncement est que ceux qui n’ont pas conscience d’être de grands pécheurs ne se renoncent pas ou trop peu et ils risquent leur ciel. Que de bons chrétiens extérieurement qui sont tout aux choses du monde même s’ils ne pèchent pas! Or cet amour des choses créées peut les perdre. "Celui qui aime le monde, la charité du Père n’est pas en lui." Ce péché peut exister sans qu’il paraisse dans aucun acte isolé. Si ces bonnes gens avaient entendu le premier motif de renoncement, ils continueraient de se renoncer le plus possible même dans leur bonne vie.

De la passion de J-C. Voilà encore une cause simplement partielle du renoncement; elle n’est pas la cause adéquate. Après le péché originel, pas un homme n’aurait jamais pu satisfaire à la justice divine avec son renoncement. Par sa passion et par sa mort J-C. nous a mérité que notre renoncement soit accepté par Dieu. Donc le sacrifice de Jésus donne une valeur divine à notre renoncement et à notre réparation. C’est une nouvelle obligation en plus de celle qui existait déjà à cause de notre destinée surnaturelle.

Évidemment il faut donner la nécessité de souffrir avec J-C. pour pratiquer la folie de la croix; tous les saints s’en sont servis avec grand profit pour leur âme et nous devons le faire aussi. Mais comme c’est une cause incomplète, les démons savent l’exploiter contre nous. On se dit, si J-C. aimait tant à souffrir, pour moi je ne me sens pas de dévotion de ce côté!

La nécessité d’être complètement transformé en divin pour arriver au ciel est toujours urgente jusqu’à la mort, quelque bon qu’on se pense. Ce n’est donc pas seulement la pourriture du péché qu’il faut enlever de l’âme, mais aussi toute bonne activité en tant que naturelle doit être divinisée non seulement physiquement par la grâce sanctifiante, mais aussi par la divinisation de tous les motifs ou des intentions. C’est là mourir à ce monde si souvent prêché par les Apôtres et par les saints. Il faut réaliser cette parole de Saint Paul avant de mourir: "Ce n’est plus moi qui vis, c’est J-C. qui vit en moi." Or le moi, c’est la personnalité morale dans les facultés spirituelles et libres, donc surtout dans l’orientation de notre activité mentale.

Donc, même en dehors de tout péché, on pourrait être pur comme la T. Ste Vierge, et il faudrait encore se renoncer. Le mieux est donc de donner ces trois causes en insistant sur la première comme la plus importante et la plus efficace dans la pratique. C’est l’ignorance de ce premier motif chez les prêtres qui fait qu’ils ne demandent plus de sacrifices, quand ils voient un chrétien éviter les péchés. Ils devraient exiger qu’il renonce à tous ses motifs naturels, qu’il renonce à tout son moi païen, à ses affections naturelles dans leurs motifs naturels. Ils devraient exiger qu’ils soient tous absolument divinisés dans toute leur activité libre des motifs et qu’ils attaquent tout cela dès qu’ils découvrent du naturel dans l’orientation de leur activité mentale. Il n’y avait rien d’humain dans les motifs de Jésus, il ne doit pas y en avoir dans les nôtres. C’est un travail de toute la vie que de sortir le païen de nos intentions. Faisons-le pour nous rendre plus dignes d’entrer au ciel en étant plus semblables à Dieu.

Dieu exige le renoncement…

Des anges absolument dans tout leur être, même avant le péché. Comme aucun être ne peut mériter la grâce sanctifiante, Dieu le leur donne en les créant. Il les élève donc à l’ordre surnaturel sans les consulter; ils n’ont donc aucun mérite là. Mais Dieu veut la leur faire mériter après coup en les éprouvant pour voir s’ils vont agir comme des êtres divins ou simplement naturels. Dieu ne se contente donc pas de la grâce sanctifiante dans les anges. Elle ne suffit pas pour qu’il les admette dans son ciel, précisément parce que Dieu n’aurait aucune gloire et les anges aucun mérite puisque leur liberté n’est pas encore entrée en jeu.

Quel dommage que les prêtres ne prennent pas une bonne leçon pour eux-mêmes dans cette façon d’agir de Dieu! En général tous les prêtres sont satisfaits quand ils pensent que les chrétiens sont en état de grâce; ils ne demandent plus rien. C’est justement parce que les chrétiens sont en état de grâce que les prêtres devraient leur enseigner et les exercer à agir divinement dans leur activité mentale libre comme Dieu a fait pour les anges.

Exemple: Supposons que je suis tout-puissant pour un moment et que j’élève un chien au rang humain en lui créant une âme humaine. Y a-t-il un nigaud qui se contenterait de cette élévation de son chien? Évidemment non! Je le fais Homme pour qu’il agisse en homme. Je vais donc surveiller son activité humaine à l’avenir et c’est par là qu’il montrera sa reconnaissance envers moi de l’avoir élevé au rang des hommes.

Or pour l’obliger d’agir en homme, je lui demanderais des choses que les hommes seuls font. Si je lui demande des choses que les chiens font, comme de japper, cela ne prouve rien pour sa nature humaine. Voilà pourquoi Dieu demanda aux anges quelque chose qui choquait leur nature angélique faite d’une intelligence et d’une volonté.

Quel fut l’objet de la tentation des anges? St Thomas dit que Dieu a dû révéler le mystère de l’Incarnation aux anges. Il dit aussi que les anges ne sont pas capables de changer leur décision une fois prise. Ce devait être quelque chose en dehors du monde des anges et ce ne pouvait pas être la Trinité elle-même. Or l’Incarnation était déjà décrétée puisqu’elle l’est de toute éternité. On peut donc conclure que c’est l’Incarnation du Verbe qui fut cet objet. En tout cas l’Église ne s’est pas prononcée et nous laisse libres.

Comme nous verrons plus tard, la seule chose qui semble choquer les démons est l’union du surnaturel avec l’humain; ce n’est pas le surnaturel en soi, ni l’humain en soi, mais l’union des deux. Ce doit donc être ce qui les a choqués dans leur épreuve. Jésus semble bien le confirmer quand il dit que Lucifer a été assassin dès le commencement et donc qu’il a voulu tuer Jésus dans son péché. En tout cas cet objet illustre bien la manière de Dieu d’éprouver ses créatures et cela nous suffit.

Héb. 1-6: "Et encore, lorsqu’il introduisit dans le monde son Fils premier-né, il dit: Que tous les anges de Dieu l’adorent!" Il est clair que Dieu n’a pas donné un nouveau commandement aux anges longtemps après leur entrée au ciel et quand Jésus naît à Bethléem. C’est donc qu’il leur avait donné ce commandement au temps de leur épreuve.

Les anges se divisèrent en deux groupes. Prenons d’abord celui de St Michel. Un ange, adorer un homme! Il a dû voir comme Lucifer combien cela répugnait à la nature angélique, bien supérieure à la nature humaine. Donc, c’était insensé pour leur intelligence et par suite pour leur volonté et donc contraire à tout leur être.

St Michel s’est surtout arrêté au divin en Jésus et à la volonté divine. Devant la majesté de Dieu il s’est effacé, s’est humilié et s’est oublié pour ne voir que Dieu et sa volonté. Aussi il a fait ce que Dieu lui demandait en disant: Qui est semblable à Dieu? Il n’a donc pas agi selon ses facultés naturelles; il les a donc sacrifiées pour l’amour de Dieu; il les a semées pour les récolter au ciel. St Michel a donc agi exactement comme s’il était déjà dans le ciel; selon la volonté divine, la sagesse divine. Il était donc mûr pour le ciel et Dieu lui a ouvert les portes du ciel.

Supposons qu’on arrive au ciel tout de suite après St Michel et qu’on lui demande qui l’a mis là. Il va répondre: Dieu seul. Puisqu’il n’a pas agi selon son propre être naturel, mais contrairement à cet être. Donc toute la gloire de son entrée au ciel revient à Dieu et lui St Michel a le mérite d’avoir sacrifié tout son être pour agir pour Dieu et comme Dieu, selon Dieu.

Maintenant prenons le cas de Lucifer. Son attention s’est portée surtout sur l’humain en Jésus et sur le fait que cela révoltait son esprit: un ange, adorer un homme? Jamais! Il ne semble donc pas avoir considéré Dieu en Jésus ni la volonté de Dieu qui voulait cette adoration. Tout en ayant la grâce sanctifiante il ne s’en est pas servi et a agi comme s’il ne l’avait pas et donc en vrai païen! Lucifer considère sa propre personnalité, son propre honneur, son jugement propre. Il agit donc selon sa nature angélique seule et pas du tout selon sa nature divine qu’il avait reçue par la grâce sanctifiante. Il agit selon son jugement et selon sa volonté tout en comptant arriver au ciel. Ces anges ont préféré leur propre nature bonne en soi à celle de Dieu; ils n’ont pas voulu se renoncer, ce qui a constitué leur péché. Le renoncement n’est donc pas une suite du péché.

Alors Dieu créa l’enfer et condamna les anges à y brûler éternellement.

Examinons la différence entre les deux groupes. Elle n’est ni dans la grâce sanctifiante ni dans la tentation; elle est uniquement dans l’attitude mentale. Le groupe de St Michel s’est livré à Dieu totalement; le groupe de Lucifer a pensé à soi avant tout. Ces mauvais anges ont cru qu’avec la grâce sanctifiante ils pouvaient agir selon leur être purement naturel comme s’ils ne l’avaient pas. Que de chrétiens les imitent! Ils agissent comme de vrais païens uniquement selon leur jugement et leur volonté propre en se disant: il n’y a pas de mal en soi. Lucifer est leur patron et où sont les prêtres qui les blâment? Où sont les prêtres qui attaquent cette activité naturelle des motifs chez nos chrétiens? Ils pensent donc comme Satan! Le parti de Lucifer était surnaturel dans ce qui ne dépendait pas d’eux, mais ils n’ont pas voulu l’être dans ce qui dépendait d’eux: dans leurs facultés libres où ils sont restés païens. La masse des chrétiens avec la masse des prêtres ont exactement cette mentalité!

Quand est-ce qu’on entend un prêtre attaquer les motifs naturels? Où sont ceux qui expliquent la différence aux fidèles entre agir avec des motifs naturels et agir avec des motifs surnaturels? Les prêtres pensent que c’est une question uniquement pour une petite élite de bonnes âmes. Quelle ignorance des voies de Dieu? C’est uniquement cette attitude mentale des mauvais anges qui les a perdus et les prêtres n’en voient pas encore l’importance! Ils ne la combattent pas! Que tous s’y mettent donc à l’avenir et qu’on montre aux fidèles la nécessité de renoncer non seulement au péché, mais aussi et surtout à soi-même en rejetant tous ses motifs naturels qui montrent qu’on travaille pour Lucifer, comme Lucifer, uniquement pour soi-même au lieu de le faire pour Dieu.

De nos premiers parents. Comme les anges, ils ont été créés avec la grâce sanctifiante qu’ils ne pouvaient jamais mériter. Dieu leur donne une chance d’agir divinement en leur demandant une chose qui contrariait leur sagesse et leur volonté naturelles. Il leur défend de manger un fruit en particulier, semblable à beaucoup de fruits dans le paradis terrestre. C’était peu mais cela suffisait pour exercer leur renoncement à leur sensualité et à leur jugement propre et donc à tout leur être. Que cela semblât fou peut se prouver par un exemple. Supposons que je vous offre des chocolats et que je vous défende de prendre tel chocolat en particulier sous peine de perdre mon amitié. Cette défense vous intriguerait fort et vous semblerait insensée. Voyons comment nos premiers parents ont agi.

Ils ont agi comme le groupe de Lucifer. Ève s’est arrêtée au fruit lui-même pour l’examiner, le sentir, le palper au lieu de penser à la défense de Dieu. Ils ont vu la convenance de ce fruit avec leur nature humaine et sensible et ils l’ont mangé. Le fait qu’ils étaient les enfants de Dieu ne les a pas frappés à ce moment décisif de leur vie. Ils ne se sont donc pas renoncés; ils ont agi en vrais païens comme s’ils n’avaient pas eu la grâce sanctifiante. Ils ont agi exactement comme Lucifer et son groupe, ils ont péché mortellement et ont mérité l’enfer comme Satan, leur patron.

On voit par ces deux exemples qu’on finit toujours par agir selon son attitude mentale ordinaire. Quand on s’arrête surtout à ce qui convient aux sens et à la partie naturelle de notre être on finit par agir en vrai païen pour contenter ce naturel sans égard pour la vie surnaturelle de la grâce qu’on peut avoir. Il faut donc bien nous convaincre de notre vie surnaturelle et de nous habituer à toujours agir selon les exigences célestes. Alors dans les tentations nous continuerons de la suivre et nous agirons pour plaire à Dieu.

Remarquons que nos premiers parents ont agi comme de vrais païens en vrais philosophes; ils se sont dit: ce fruit est bon en soi, donc mangeons-le… Ils auraient dû le considérer avec toutes ses circonstances concrètes et donc comme défendu par Dieu pour eux.

Des hommes, qui sont tous appelés à la vision béatifique et donc tous devront se renoncer pour entrer au ciel. Ils devront sacrifier tout leur être et sensible et spirituel. Ce sacrifice sera surtout dans leurs deux facultés spirituelles et libres, car c’est là qu’est le mérite et la gloire de Dieu. Dieu est donc obligé de nous envoyer une foule de choses désagréables pour toute notre nature et dans le corps et dans l’âme. Puisqu’il veut nous faire agir comme des enfants de Dieu, il doit nous demander des choses que les hommes ne feraient pas volontiers. Voilà pourquoi il envoie tant d’épreuves à tous les hommes; c’est pour leur donner une chance d’agir comme des enfants de Dieu.

Combien peu agissent comme St Michel en ne regardant que le divin dans la tentation, pour faire la volonté de Dieu aux dépens de la leur! La plupart s’arrêtent surtout au sensible et à ce qui est conforme à leur nature humaine et finissent par agir comme des païens en imitant Satan le premier païen!

On voit combien la théologie spéculative avec ses "in se" favorise l’imitation de Lucifer dans les objets qui font la tentation. Ce que Dieu pense de tous ces objets est autrement important pour des enfants de Dieu que ce que la raison en pense "in se". Jamais les philosophes ne poussent au renoncement à soi-même parce qu’il est bon en soi. Pourtant il est l’ennemi de Dieu dans l’ordre surnaturel, comme Jésus le dit: "Si quelqu’un veut me suivre qu’il se renonce lui-même, qu’il prenne sa croix tous les jours et qu’il me suive!" Il faut donc se renoncer pour suivre Jésus-Christ.

Deuxième Partie : La Doctrine de St Paul

On trouve la doctrine de la folie de la croix un peu partout dans les écrits de St Paul, mais c’est surtout dans les premiers chapitres de sa première épître aux Corinthiens qu’on la trouve plus développée. Ces chapitres devraient être expliqués à tous les fidèles du monde, car c’est là qu’est ce que St Paul appelle: la force et la sagesse de Dieu. C’est quand on la pratique que Dieu agit le plus puissamment pour nous diviniser. Mais où sont les fidèles qui en ont jamais entendu parler? Au lieu d’attaquer le païen dans la mentalité, les prêtres se contentent d’attaquer le péché, ce qui fait paraître le naturel mental comme bon comparé au péché et les fidèles le gardent quoiqu’il ne soit bon à rien pour le ciel.

St Paul commence par attaquer les quelques dissensions ou coteries qui nous paraissent bien insignifiantes, mais qu’il condamne avec grande force. Les uns se vantaient d’avoir été baptisés par Paul, les autres par Pierre ou par Apollos; on ne voit pas de péché là. Il condamne donc leur esprit naturel de juger les choses selon les apparences, comme de faire plus de cas de l’Apôtre qui les a baptisés que de J-C. au nom duquel ils l’ont été.

"Vous êtes donc toujours charnels, leur dit-il, puisqu’il y a parmi vous, jalousie et esprit de contention, n’est-il pas évident que vous êtes charnels et que vous vous conduisez selon l’homme." Puis il montre qu’ils se glorifient dans des hommes qui ne sont que les ministres de Celui en qui ils ont cru. Ils jugent donc selon les apparences et non selon la foi; donc ils sont hommes et charnels.

Comme St Paul attaque le naturel mental pas méchant en soi, mais païen quand même! Ils s’appuient sur des riens! Paul n’est rien, Apollos n’est rien; ils n’ont fait qu’arroser et planter, Dieu seul a fait croître. Donc Dieu seul doit être notre gloire, pas ses instruments. "Que personne donc ne se glorifie dans les hommes!" Il ne veut donc pas un seul motif naturel, mais uniquement des motifs surnaturels.

"J-C. ne m’a pas envoyé pour baptiser, mais pour prêcher." Voilà une bonne leçon pour les prêtres, eux qui prêchent de moins en moins. La mode se répand de plus en plus de ne plus prêcher pendant les mois d’été et l’on abrège les sermons constamment. Les prêtres auront un grand compte à rendre pour cette négligence coupable d’instruire le peuple si ignorant en matière de religion.

Ce qui leur manque est justement la doctrine de la folie de la croix que nous expliquons ici. Une fois qu’un prêtre a saisi ce point, il a toujours de la matière pour donner de solides et longues instructions que le peuple goûte parce que le St Esprit agit dès qu’on parle de cette sagesse de Dieu qu’est le renoncement ou la folie de la croix. Dans cette doctrine, les brebis entendent la parole du Maître et elles le suivent avec goût et profit spirituel.

"Pour prêcher l’Évangile non pas toutefois selon la sagesse de la parole pour ne pas rendre vaine la croix de J-C. Car la parole de la croix est une folie pour ceux qui se perdent, mais pour ceux qui se sauvent, pour nous, elle est la force de Dieu."

Cette doctrine revient à ceci que Dieu se moque des moyens humains. Pour que les hommes ne lui volent pas sa gloire, il aime à prendre des moyens réputés inutiles ou inférieurs par les hommes pour produire des effets surnaturels afin d’en avoir tout seul la gloire.

C’est pourquoi St Paul ne prêche pas selon la sagesse de la parole ou avec éloquence naturelle. Car s’il basait son efficacité sur ces moyens humains, il ferait mentir la doctrine de la folie de la croix et la rendrait vaine. Ailleurs il appelle ceux qui prêchent de cette façon païenne "des airains sonnants et des cymbales retentissantes."

Quel dommage que tant de prêtres prêchent avec le grand style et le ton oratoire qui n’enseigne rien aux foules et qui alimente l’orgueil des savants. Tous les philosophes affectionnent ce genre pompeux! c’est une façon de cacher le vide de leurs pensées et leur ignorance des choses surnaturelles. Cette prédication qui vient seulement de la tête ne dérange pas leur cœur tout aux choses de la terre.

Ces prédicateurs veulent plaire au monde avant tout, ils ont peur de se faire critiquer; ils sondent l’opinion des fidèles et leur donnent ce qu’ils veulent; une prédication qui ne changera rien dans leur vie toute aux choses de la terre. Ces philosophes avec leur prédication des vérités "in se" ou dans la stratosphère, laissent les gens parfaitement à l’aise avec tous les amusements du monde. Ils prêchent tous le juste milieu, la modération, la tempérance purement naturelle. Ils apportent constamment des raisons naturelles, humaines, pour la pratique de ces vertus morales naturelles. S’ils parlent de l’ivrognerie, ils apportent des motifs naturels pour l’éviter et en appellent seulement à la raison. Est-ce que ç’a du bon sens de gaspiller comme ça? de battre sa femme et ses enfants? de se ravaler au rang des brutes? Pas un démon ne va persécuter de tels prédicateurs qui travaillent si bien pour l’enfer.

Celui qui parle du cœur et qui vit de la folie de la croix est béni de Dieu et sa doctrine va au cœur des fidèles pour les transformer dans la grâce. Ils aiment cette parole et l’écoutent volontiers des heures de temps. Ils savent qu’il vit ce qu’il prêche et ils reconnaissent en lui la parole du Maître et ils la suivent avec joie.

Les démons aussi reconnaissent le Maître et ils se lancent à l’attaque pour faire cesser cette prédication qui leur fait tant de tort. Ils soulèvent une telle tempête de critiques de toutes sortes contre lui que les supérieurs effrayés finissent par le bâillonner. C’est cette folie de la croix qui les enrage. Dès qu’un prêtre prêche le renoncement à soi-même et à la sagesse humaine, les fidèles sont renversés et même scandalisés parce qu’ils n’ont jamais entendu cette doctrine de nos prêtres philosophes. Ils vont l’exposer à d’autres qui l’ignorent aussi, qui accusent ce prédicateur de prêcher une doctrine nouvelle, étrange et erronée. Ça ne prend pas de temps qu’il est vite écrasé sous le flot de dénonciations des philosophes influencés par les démons. C’est cette persécution inévitable qui fait peur à un grand nombre de prêtres qui aimeraient peut-être à prêcher ce renoncement; mais ils craignent les conséquences et habilement ils aiguillent leur prédication sur d’autres choses qui ne changent rien chez les fidèles.

Au lieu d’en gagner, le christianisme perd du terrain avec des milliers de prêtres fort savants et qui parlent à des fidèles instruits en général. Or les Apôtres étaient des ignorants qui parlaient à des ignorants et ils les transformaient en si bons chrétiens qu’ils pouvaient aller au martyre par centaines et par milliers. Eh bien! qu’on revienne à la prédication du renoncement à soi-même, qui est la folie de la croix, et la face de la terre sera renouvelée parce que le St Esprit agira puissamment dans les cœurs pour les diviniser. Qu’on soit prêt à se faire reléguer en exil ou dans quelque camp de concentration par les philosophes! Alors on mènera la vie contemplative et l’on composera d’autres instructions pour une autre campagne contre les païens!!!

S. Cyprien, Ep. 1, écrit: "Que dans les plaidoyers, dans les harangues devant le peuple, on fasse étalage, si l’on veut, d’une éloquence pompeuse ou d’une élocution facile; mais s’il est question de parler de Dieu ou de faire l’apologie de la foi, les moyens oratoires deviennent inutiles; les faits tout seuls sont éloquents. En un mot les paroles véhémentes, plutôt que de belles périodes, voilà ce qu’il faut attendre d’un orateur chrétien. Il ne s’agit pas pour lui de charmer les oreilles de la multitude par un langage étudié, mais de parler de la bonté de Dieu dans un style simple et sans ornements."

Le comte de Montalembert, aux Dominicains de Paris: "Mes Pères, je viens au nom de plusieurs de mes amis, hommes du monde comme moi, vous faire une prière. Voilà le carême qui va commencer; un bon nombre d’entre vous vont prêcher dans les premières églises de Paris. Je viens vous supplier en leur nom et au mien de ne pas nous donner de grands sermons et de belles thèses sur la morale indépendante et autres sujets de ce genre; mais de nous faire simplement un bon catéchisme sur le dogme et la morale. C’est ce qui nous est le plus nécessaire. Si vous saviez comme nous sommes ignorants des choses de la religion, nous gens du monde, même ceux qui sont les mieux disposés et le plus instruits! Et c’est aussi ce qui nous intéresse davantage. Quand nous allons au pied de vos chaires ce n’est pas pour écouter de beaux discours, nous pouvons en entendre ailleurs et parfois nous savons en faire autant, et d’aussi éloquents que les vôtres; nous y allons pour nous instruire. Croyez-le bien, pour nous intéresser en nous instruisant, rien ne vaut un bon catéchisme." La Nouv. France, 1904, p. 430 Raphaël Gervais.

Le grand genre a fait un tort immense à l’Église. Ces grands sermons étudiés et appris par cœur demandent beaucoup de temps avec le résultat qu’on ne prêche qu’aux grandes fêtes et pendant le carême, comme cela se fait encore dans plusieurs pays d’Europe. Les prêtres mondains et sans foi affectionnent ce genre pour cacher leur manque de solide doctrine sous des phrases ronflantes qui endorment les fidèles. Les saints ont fui ce genre comme la peste par un instinct divin. Celui qui prêche du cœur et ce qu’il vit s’exprime simplement avec grand amour des choses divines; il édifie, instruit et convertit. C’est de cette façon que prêchait St Paul; il devrait être notre modèle.

Pourquoi les prêtres ont-ils si peur de la persécution? St Paul l’a été toute sa vie comme Maître. Quel inconvénient que le disciple le soit aussi? Jésus donne cette persécution comme le signe de ceux qui lui appartiennent. "Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui, mais parce que vous n’êtes pas du monde, le monde vous hait comme il m’a haï et il vous persécutera comme il m’a persécuté." Les prêtres qui devraient réellement trembler sont ceux qui ne sont pas persécutés pour leur doctrine. C’est donc qu’ils ne prêchent pas comme Jésus et qu’ils ne lui appartiennent pas!

Quelle condamnation pour tant de prêtres qui s’arrangent très bien avec le monde, qui s’en vont à la dérive avec lui parfaitement d’accord dans leurs jugements et dans leurs actes, comme les conversations le montrent, toutes des mêmes sujets terrestres. Que tous se hâtent d’étudier ces premiers chapitres de la première épître aux Cor. pour se pénétrer l’esprit de cette doctrine de la folie de la croix si contraire à l’esprit païen et donc au monde. On n’a qu’à s’y mettre et le St Esprit adoucira cette pratique par sa grâce, c’est la sagesse de Dieu et la force de Dieu. Plus on se renonce et plus Dieu agit en l’âme.

"Car la parole de la croix est une folie pour ceux qui se perdent mais pour nous elle est la force de Dieu." Plus bas il dit qu’elle est "la sagesse de Dieu". On fait donc du bien en proportion qu’on prêche cette folie de la croix. Donc plus on demande des sacrifices et plus on en obtient, précisément parce que Dieu agit plus fortement. C’est l’humain et le naturel dans nos facultés qui empêchent l’action du St Esprit dans l’âme. Plus on exige dans les retraites et plus on a de monde. Plus on attaque le naturel et plus les gens viennent.

Quand nous avons décidé de donner des retraites sacerdotales de huit jours en silence complet, que d’amis autour de nous ont protesté, ont affirmé que les prêtres ne viendraient pas et l’on donnait comme exemple les petites retraites de trois jours avec deux récréations par jour… et si peu de prêtres qui y venaient!

Eh bien! les prêtres viennent plus nombreux à nos retraites de 8 jours sans aucune récréation avec un dimanche en plus. C’est que le St Esprit agit plus fortement sur les prêtres. Que de prêtres raccourcissent les offices pour avoir plus de monde et ils en ont toujours de moins en moins. Ils abrègent leurs sermons et les gens les aiment encore moins. Combien veulent toujours adoucir les règlements dans les couvents et les collèges, dans les écoles pour avoir plus d’élèves. Mais les élèves ne sont pas plus contents et le succès des études laisse à désirer de plus en plus. Plus les prêtres exigeront de grosses quêtes et plus les gens donneront et auront de quoi donner. Sur ce point les prêtres sont assez dociles.

Surtout que tous les prêtres, les parents et les instituteurs demandent des sacrifices de jugement et de volonté et Dieu les secondera pour obtenir des merveilles de leurs inférieurs. Tout le monde se plaint de l’esprit d’indépendance chez les élèves et chez les ouvriers. C’est parce que les prêtres ne demandent à peu près jamais de sacrifices de jugement et de volonté, comme ils devraient le faire selon la doctrine de J-C. Qu’ils cessent donc d’attaquer le péché et qu’ils attaquent les causes subjectives des péchés: le naturel dans la mentalité ou les motifs naturels du païen. Tout de suite ils verront l’action du St Esprit pour bénir leurs efforts dans cette vraie direction surnaturelle.

"Mais ce qui est insensé selon le monde, Dieu l’a choisi pour confondre les sages et ce qui est faible selon le monde Dieu l’a choisi pour confondre les forts. Ce qui est vil et méprisable selon le monde, et ce qui n’est rien, Dieu l’a choisi pour détruire ce qui est, afin que nulle chair ne se glorifie en sa présence."

Voilà l’énoncé clair de la folie de la croix, le contraire du jugement des hommes. Quand les hommes pensent qu’une chose ou une personne ne peut rien produire, Dieu aime à s’en servir pour produire de bons effets afin d’en avoir toute la gloire. Ils sont bien obligés de dire que Dieu seul a fait ces choses. Comme cette doctrine est encourageante pour les petits, les faibles, les ignorants! S’ils ont l’esprit de foi Dieu peut les prendre pour accomplir des merveilles pour le salut du monde et pour sa gloire. Dieu agit de la sorte afin qu’aucun homme ne puisse dire: c’est moi qui ai fait cela.

Ce n’est pas une doctrine que les orgueilleux goûtent. Tant pis pour eux! Ils n’ont qu’à s’effacer pour tout attribuer à Dieu et il se servira d’eux. Mais plutôt que de perdre sa gloire, Dieu aime mieux se servir des cruchons que d’hommes intelligents qui lui volent sa gloire. Que les prêtres expliquent cette doctrine aux premiers de classe dans les collèges, aux riches dans le monde, aux hommes influents par leurs talents. S’ils sont vraiment humbles et se renoncent pour attribuer à Dieu la gloire de ce qu’ils font, Dieu se servira d’eux; autrement ils seront rejetés de Dieu et ne réussiront en rien.

Au ciel, il est certain qu’aucun élu ne va s’attribuer le bien qu’il fera là; il doit donc agir de la sorte tout de suite sur la terre dans la foi. L’humain doit s’anéantir devant le divin. Comme c’est contraire au naturel! Comme les hommes ne veulent pas le faire! Chacun tient mordicus à garder pour lui la gloire de tout ce qu’il fait, comme s’il était son propre maître ou son propre agent au lieu d’un simple instrument dans les mains de Dieu. Comme on est habile pour faire connaître à tout le monde qu’on est l’auteur de telle bonne chose! Comme on est furieux si on nous vole nos droits d’auteur!

Voilà pourquoi les démons mettent tout en œuvre pour nous empêcher de comprendre la folie de la croix et de la prêcher aux fidèles; Dieu est privé de sa gloire d’autant. Sans cette doctrine comme les hommes sont orgueilleux et chatouilleux de leur gloire! Comme ils sont avides de louanges qui ne leur appartiennent pas du tout! Comme ils se démènent pour en avoir! On peut les faire se morfondre en leur promettant des louanges et des honneurs!

Que tous soient bien convaincus qu’ils n’auront jamais aucune récompense au ciel pour tout ce qu’ils auront fait en vue de plaire au monde et pour s’attirer des louanges. Jésus leur dit: "Vous avez votre récompense en ce monde; vous n’aurez pas celle de l’éternité… Que de vies perdues pour le ciel! Que de travaux inutiles! Quelle déception pour une foule de chrétiens dans tous les rangs de la société quand ils arriveront dans l’éternité! Ils ont travaillé pour le monde, leur maître, qui n’existe plus pour eux! et ils n’ont rien fait ou trop peu pour le Maître qui demeure éternellement.

St Paul dit que ni lui qui plante, ni Apollos qui arrose, sont quelque chose, mais Dieu seul qui fait croître est tout. Si donc les Apôtres dans le ministère sacré ne sont rien devant Dieu, à plus forte raison tous les hommes dans leur travail ne sont rien devant Dieu. Rappelons-nous qu’au point de vue de l’activité, tout le mérite est attribué à l’agent et non à l’instrument. On ne félicite jamais un scalpel d’avoir réussi une opération, mais uniquement le chirurgien qui maniait ce scalpel… quand même cet instrument avait une certaine efficacité particulière. Allons-nous prendre cinquante ans pour nous convaincre que nous ne sommes que des instruments dans les mains de Dieu et que par conséquent toute la gloire de ce que nous faisons lui appartient en propre… même si nous avons une efficacité propre. C’est Dieu qui la met en marche et donc il a droit à sa gloire, à cause de ce concours divin.

"Si quelqu’un d’entre vous paraît sage selon le monde, qu’il devienne fou pour être sage, car la sagesse de ce monde est folie aux yeux de Dieu, selon qu’il est écrit: Je perdrai les sages dans leur propre finesse." "Que personne donc ne se glorifie dans les hommes."

C’est la condamnation générale de la mentalité des hommes qui suivent les idées du monde comme leur unique norme de conduite. Ils scrutent l’opinion du monde; ils la suivent servilement, montrant bien que le monde est leur maître souverain. L’esclavage des femmes pour la mode indique bien le souverain domaine qu’exerce le monde dans nos familles. Comme elles se soumettent à toutes ses bêtises avec une soumission parfaite! Elles n’en feraient certainement pas autant pour plaire à Dieu. Et les hommes sont aussi esclaves des amusements de toutes sortes que le monde leur fournit. Que d’enfantillage dans cette passion pour des joutes qu’ils ne voient même pas parfois, qu’ils suivent dans les journaux ou à la radio. "N’aimez pas le monde ni ce qui est dans le monde. Si quelqu’un aime le monde, la charité du Père n’est pas en lui."

Voilà une vie que le monde estime sage et qui finit avec le monde et prépare une éternité loin de Dieu et de tout bonheur! Eh bien! L’Apôtre veut qu’on devienne fou en renonçant à cette sagesse du monde pour mettre tout son bonheur uniquement dans les choses de Dieu et de l’éternité. Ceux qui se donnent à Dieu de la sorte passent pour fous aux yeux des hommes, mais ils sont sages aux yeux de Dieu.

Dans le deuxième chapitre, St Paul répète trois fois qu’il ne prêche pas selon la sagesse de la parole humaine, "afin que notre foi ne soit pas établie sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu."

Dans l’ordre surnaturel encore plus que dans l’ordre naturel, Dieu veut absolument que les hommes ne comptent que sur lui pour réussir dans leurs entreprises. Moins on compte sur les moyens humains et plus on a Dieu avec soi. C’est pourquoi St Vincent de Paul disait qu’il craignait plus les moyens humains que le diable. Il faut bien en employer, mais il faut attendre le succès uniquement de Dieu.

Voici un bel exemple de cet esprit de foi en Dieu seul. Il y a quelques années, à Cariathiarim, en Juda, où l’Arche d’alliance était restée vingt ans, une Sr Française, Sr St Joseph, si je me rappelle bien son nom, se mit dans la tête de bâtir une église sur cette colline. Les Arabes ne voulaient pas lui vendre un pouce de terre. Eh bien! elle s’est mise à mettre des médailles miraculeuses aux pieds des arbres et sur le terrain qu’elle voulait. Finalement elle a eu tout ce qu’elle voulait. Il lui restait 2000 frs. pour bâtir son église, qu’elle voulait de 1,000,000 frs. Elle prit tout son argent et le donna en aumônes aux pauvres, puis elle dit à Dieu: Maintenant envoyez-moi de l’argent pour bâtir mon église. Il ne sera pas dit que j’ai mis du mien là!" Le Curé me disait à moi-même que l’argent s’est mis à venir à flots et l’église est finie et toute payée! Sœur St Joseph repose là, son œuvre terminée, bien finie!

En voilà une qui avait compris la folie de la croix parfaitement. Quelle leçon pour tant de prêtres et de communautés qui comptent sur les qualités de tel Procureur pour les faire vivre… et ce Procureur les ruine! D’autres comptent sur tel riche… et ce riche ne se présente pas! Des parents comptent sur leurs enfants et les enfants ne veulent pas de leurs vieux parents. Un autre compte sur une bonne somme d’argent en banque ou en bourse pour ses vieux jours… et il perd tout… Tous ces gens auraient dû compter uniquement sur Dieu même s’ils avaient un bon procureur, des amis riches ou de bons enfants…

Que de fiascos uniquement à cause de ce manque d’esprit de foi! Les gens jugent et agissent selon le bon sens humain et surtout comptent sur lui, alors Dieu se met contre eux pour leur montrer qu’ils ne peuvent rien sans lui. Un jour Dieu fit massacrer des milliers de Juifs parce que leur roi avait été consulté un roi païen d’Égypte. Ce n’était pas péché mais c’était de l’humain, du naturel, et du bon sens, mais Dieu veut que nous comptions sur lui seul. La sagesse humaine est de la folie pour lui.

N’oublions pas l’exemple de Gédéon. En partant pour un voyage, il est évident qu’il faut faire des préparatifs, comme s’il n’y avait pas de Dieu, mais en même temps qu’on ne mette pas sa confiance dans ces préparatifs, mais uniquement en Dieu… et Dieu bénira ce voyage. Un homme marie une bonne fille apparemment, mais qu’il ne mette pas son bonheur dans les belles qualités de sa femme, mais uniquement en Dieu et alors Dieu lui laissera ses bonnes qualités et ils seront heureux. Autrement s’il agit en païen, Dieu fera perdre ses bonnes qualités à sa femme et ils seront malheureux. N’oublions pas cette sagesse de Dieu! Ne comptons que sur lui si nous voulons ses bénédictions. "Sans moi vous ne pouvez rien faire."

"Car je n’ai point prétendu savoir autre chose parmi vous que J-C. et J-C. crucifié." Voilà une bonne leçon pour tous les prêtres du monde entier. Prêcher J. C. crucifié. Pas seulement Jésus doux et humble de cœur passant en faisant le bien, pas seulement Jésus miséricordieux, guérissant les malades et consolant les affligés. Comme nos philosophes aiment à faire ressortir les qualités sociales de Jésus! Jésus qui préside à tous leurs amusements, qui les encourage dans tous leurs plaisirs, qui se mêle à tout le monde pour partager leurs soirées dans les salons, fume sa cigarette, qui hurle avec les spectateurs d’une partie de ballon, enfin un Jésus sport, comme on aime à le prêcher au pays du Base-Ball!

Ainsi l’abbé Connell de l’Université catholique de Washington écrit un catéchisme qui est très pratique, mais qui enseigne justement une religion d’un J-C. qui se prête à tous les plaisirs des hommes et qui se contente d’offrir à Dieu toutes les jouissances qu’ils prennent sous ses yeux. Nulle part on ne parle de la nécessité du sacrifice dans les plaisirs permis et les bonnes choses en soi. Personne au monde ne va trouver à redire à ce catéchisme qui suit absolument le bon sens humain et les tendances naturelles des hommes. Ce docteur ne sera sûrement jamais dénoncé à ses supérieurs par les démons. Il n’y a rien là qui puisse leur nuire le moindrement. Ce prêtre ne s’est jamais nourri de la doctrine de St Paul dans les chapitres que nous expliquons ici.

St Paul prêche J-C. crucifié qui est scandale pour les Juifs et une folie pour les païens. Il faut donner cette doctrine de la folie de la croix qui choque tout le monde païen, donc le monde qui suit le bon sens humain, comme tous nos philosophes en général qui enseignent dans nos Séminaires et nos maisons de formation et dans toutes les Universités supposées catholiques.

Où sont les prêtres qui font ressortir cette doctrine de Jésus qui contrarie toutes les tendances du monde, non seulement méchantes mais même bonnes en soi, mais naturelles? Où sont les prédicateurs catholiques qui choquent le bon sens humain? qui bouleversent les consciences des catholiques à mentalité païenne? Jésus est venu pour être un signe de contradiction, pas seulement pour les adultères, mais pour tous les hommes sans exception. Où sont les prêtres qui contrarient le monde? qui transforment leur vie naturelle en vie surnaturelle?

Ayant été formés par des philosophes, ils n’ont jamais compris la folie de la croix qui n’entre pas dans leurs "in se"; ils ne sont donc pas capables de la donner au monde. St Paul soulevait toutes les populations contre lui par sa doctrine et partout où il allait. Il ne prêchait donc pas une doctrine à l’eau de rose comme les prêtres de nos jours. C’est qu’il exigeait le renoncement à toutes les affections humaines et naturelles, à tous les motifs naturels même bons en soi. Il brisait donc la vie païenne de tous ceux à qui il prêchait. Ceux qui ne la prenaient pas devenaient ses pires ennemis. Il insistait sur le crucifiement de toute l’activité naturelle dans ses auditeurs. Les philosophes de nos jours le savent si bien qu’ils se gardent bien de prêcher St Paul qui les condamne à toutes les pages de ses écrits.

Combien de prêtres font ressortir la doctrine du corps mystique avec la nécessité absolue de subir le même traitement que notre chef et donc de se laisser crucifier en sacrifiant le monde, comme J-C. crucifié au monde et pour qui le monde est crucifié. Donc ce sont deux rivaux; il faut choisir entre l’un et l’autre; on ne peut pas aimer les deux; il faut en aimer l’un et haïr l’autre. Où sont les prêtres qui prêchent cette doctrine aux fidèles? Qui l’a jamais entendue prêcher?

Puisque Jésus nous a rachetés en étant crucifié, nous ne serons unis à lui qu’en étant aussi crucifiés avec lui et comme lui. Ce n’est qu’en proportion qu’on porte sa croix qu’on le suit. Il le dit expressément et sur tous les tons. Quand les prêtres vont-ils commencer à prêcher la folie de la croix? ou le renoncement à son jugement et à sa volonté, à sa vie même? Il faut mourir au monde pour vivre en J-C. Où est le prêtre qui prêche cette mort au monde? Tous les démons sautent sur lui dès qu’il s’en trouve un assez courageux pour le faire. Ils le font vite bâillonner par les supérieurs comme Jésus a été condamné par les grands-prêtres. Mais c’est égal, son sacrifice fait avancer justement les âmes dans la grâce à l’exemple de son divin Maître qui a sauvé le monde en mourant sur la croix. Ce sont des prêtres de cette trempe que Jésus veut pour continuer son œuvre en continuant son crucifiement.

D’après les Apôtres le calice de Jésus était plein de sottises, d’injustices et de cruautés. Or les chrétiens seront au ciel seulement en proportion qu’ils boivent au calice de Jésus. Où sont les prêtres qui prêchent aux chrétiens la nécessité absolue de souffrir les sottises, les injustices et les cruautés des autres? Voilà la folie de la croix! Jamais les fidèles n’entendent cette doctrine. Les prêtres et les religieux l’ont-ils entendue durant leurs années de formation? On peut en douter puisqu’ils ne la prêchent jamais une fois prêtres.

Voilà pourquoi notre christianisme n’a pas de vigueur, de mordant! On donne un christianisme à l’eau de rose qui ne contredit personne, sans folie de la croix, donc sans Jésus crucifié, qui est la force et la sagesse de Dieu. Voilà pourquoi Dieu livre le monde au massacre; il veut le débarrasser de ce christianisme de camouflage et factice.

Puis St Paul montre ce qu’est un vrai disciple de J-C. crucifié. "Car il me semble que Dieu nous a fait paraître, nous les derniers des Apôtres, comme destinés à la mort, puisque nous sommes devenus un spectacle au monde, aux anges et aux hommes. Nous sommes insensés à cause de J-C., nous sommes faibles, méprisés. Jusqu’à cette heure nous souffrons la faim, la soif, la nudité; nous sommes meurtris de soufflets; nous n’avons pas de demeure stable; nous nous fatiguons à travailler de nos mains; on nous maudit et nous bénissons, on nous accable d’injures et nous répondons par des prières, nous sommes devenus jusqu’à présent comme les ordures du monde et les balayures de tous."

Voilà ce que le monde pense des vrais disciples de J-C. crucifié quand ils prêchent la doctrine de la folie de la croix. Les prêtres qui ne comprennent pas cette sagesse sont classés par St Paul avec l’homme animal qui ne perçoit pas les choses de Dieu et qui les juge insensées selon la sagesse de la chair, parce que c’est par une lumière spirituelle qu’on en juge… et ils ne l’ont pas!

Combien de temps nos chrétiens vont-ils rester encore dans cette catégorie avec des philosophes pour les diriger selon le point de vue païen de la religion, qui est le seul que nos philosophes comprennent avec leurs "in se" qui ramènent tout à la seule raison.

Prions pour que le St Esprit leur accorde la grâce de revenir plus souvent à St Paul pour apprendre de lui la pratique de la folie de la croix qu’ils ignorent à peu près complètement. Que la Ste Vierge vienne au secours des pauvres aveugles qui ignorent justement ce qui est la sagesse de Dieu et sa force. Voilà la doctrine qui renouvellera la face de la terre et qui multiplierait les vrais apôtres pour convertir le monde. Prions à cette intention!


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